jeudi 24 avril 2014

L’Humour à l’école maternelle ?


Pas facile l’humour avec les plus petits, certains albums  adressent  de lourds clins d’œil aux parents-acheteurs dans des registres pas vraiment accessibles aux enfants ou réfèrent à des sujets à la mode chez les adultes et vite obsolètes…Trois albums qui me semblent éviter ces écueils :

La grosse bête, de Pénélope Jossen, entre l’extinction des dinosaures et le mythe de David contre Goliath. Nous avons donc une grosse bête féroce et une toute petite bête pas féroce du tout. La grosse bête ressemble beaucoup à un tyrannosaure et la petite à un lézard. La grosse bête est la plus forte, forcément, alors la petite se fâche et la mord avec ses petites dents. Furieuse, la grosse bête s’apprête à la croquer, elle est déjà entre les terribles mâchoires…quand une énorme boule de feu tombe du ciel et grille tout ce qui n’est pas capable de se cacher dans un petit trou, les énormes dinosaures par exemple. « Quand il n’y eut plus rien à brûler, le feu s’éteignit et la petite bête sortit de sa cachette… ». Petit format carré, traits noirs à l’encre et  taches orange comme seule couleur (au moment de la boule de feu), cet album dépouillé est à la fois drôle et rassurant pour les petits : on aimera se débarrasser de cet affreux monstre et revenir sur cette histoire  qui finit si bien. Pour les petites et toutes petites sections, Pénélope Jossen, La grosse bête, l’école des loisirs, 8,20€

 

A la maison il y a des règles ! Un album qui décline les travers et les agacements de la vie quotidienne en famille, un humour qui s’adresse à tous : parents et enfants. On commence doucement avec le bonjour du matin, on accélère avec le changement du linge et la maison finit en champ de bataille entre éléphants, inondations, monceaux de livres et trapèze sur les lustres. On sort aussi, en ville, histoire de rappeler les règles pour traverser la rue où ne JAMAIS parler à quelqu’un qu’on ne connaît pas (même si il a perdu son très gentil chien qui s’appelle Kiki). Un album qui concerne plutôt la vie de la maison mais peut se partager en classe histoire de rire ensemble de certaines illustrations « Au pied de la lettre ». A la maison il y a des règles, Laurence Salaün et Gilles Rapaport, Seuil jeunesse, 13,90€. De la moyenne section au CE1.
 
 

 

Rikiki terrible pirate des mers, un grand album illustré de Marianne Barcilon. Sur l’île de Barbuda, Rikita Fleur de Java et Cap’tain Grabuge viennent d’avoir un bébé, Ricky, descendant des plus illustres familles de pirates des mers du Sud. Il a deux caractéristiques communes à beaucoup de petits frères, Ricky, une voix terrifiante quand il braille et une taille minuscule. On pourra ajouter le caractère intraitable: pas question de rester avec mamie Bouillabaisse,  Ricky veut écumer les mers sur le bateau de son papa. Il intègre donc l’équipage du Poustwadla au milieu des pirates tatoués et musclés, affligés de voir embarquer une telle demi-portion. Mais Ricky va faire la preuve qu’on a toujours besoin de plus petit que soi au cours d’aventures pleines de drôlerie. Les illustrations sont amusantes, le vocabulaire choisi et enrichissant pour les élèves. Rikiki terrible pirate des mers, Marianne Barcilon, kaléidoscope, 13€. De la moyenne section au CE1

mardi 22 avril 2014

Trois albums pour un parcours rêveur…




 
Rosalie et l’arbre au rocher. Rosalie passe l’après-midi chez sa grand-mère, elle retrouve ses jouets préférés : les petits chevaux, l’ours et le poupon baigneur. Rien de plus banal, pourtant l’aventure tourne au rêve éveillé, les chevaux galopent crinière au vent, l’ours et le poupon prennent vie, un homme-grenouille coiffé d’un chapeau sort de la mare, une sorcière traque la petite troupe sous les formes les plus effrayantes…Emilie Séron restitue les univers de l’enfance, le monde dilaté de l’imagination, la vie des éléments quand ils deviennent magiques. Après la peur vient la douceur : la grand-mère, la tarte aux myrtilles et les câlins…C’est rassurant sans être mièvre, empreint d’une tendre étrangeté et loin des clichés habituels. Pour tous les niveaux de la maternelle : Rosalie et l’arbre au rocher, Emilie Seron, Pastel l’école des loisirs, 13.00€

 
Quand je serai un animal. Pourquoi vouloir devenir pompier ou maîtresse d’école plus tard? On peut aussi  devenir un animal quand on rêve, et pourquoi pas ? Pourquoi ne pas devenir hibou pour chasser les cauchemars qui traînent, cheval pour rencontrer des princesses abandonnées, souris pour se glisser dans le lit des parents, flamant rose et championne de marelle ? La finesse des dessins d’Aurélia Alcaïs, ses personnages aux yeux étranges, son univers blanc et pastel ouvrent un rideau de voile derrière lequel on peut rêver sans limite…
Pour tous les âges de la maternelle, à mettre en lien avec le fameux Il ne faut pas habiller les animaux pour  retrouver un porc-épic inattendu, Quand je serai un animal, Aurélia Alcaïs, Seuil jeunesse, 15.00€

 

 Si tu veux voir une baleine, merveilleux album et coup de cœur énorme. L’histoire commence devant un cadre vide qui se peuple et grandit à mesure que l’on tourne les pages : c’est la recette pour voir une baleine, il faut une fenêtre, un océan et du temps pour attendre. Il faut regarder sans fléchir, le fauteuil devient barque, attention aux pièges du sommeil qui pique les yeux. Il faut oublier la douceur des roses qui veulent tant être admirées et chercher plus loin comme le Petit Prince, sans se laisser distraire. Dans ce livre, on suit un garçon et son chien à travers des paysages à hauteur d’enfant, parmi des peuples minuscules, sous des ciels habités de nuages fantasmagoriques. Et finalement on la voit, la baleine, elle nous surprend sur une double page magistrale. Entre deux eaux, immense et silencieuse, à toucher le petit héros qui scrute l’horizon  sans la voir. Alors, elle sort son immense nez couvert de bosses devant la barque légère où l’enfant le chien et un petit oiseau lui font face.

On pense à Maurice Sendak et son usage de la page pour traverser le rêve, à Saint-Exupéry, à Iela Mari pour ses herbes habitées…Mais on se laisse surtout porter par le charme de cet album si complet. Difficile de préconiser un âge, cet ouvrage convient à la maternelle mais sa poésie et son récit d’une quête proche et lointaine peuvent enrichir des élèves de tous âges. Si tu veux voir une baleine, Julie Fogliano, illustrations d’Erin e. Stead (http://youtu.be/3TuHyU-onkc) Kaléidoscope 12€